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Vrillettes


Si aucun œil humain n’a encore croisé les mots de ces pages, d’autres s’y sont laissés prendre… marquant leur passage d’une trace. Il serait si facile d’imaginer dans ce mot « vrillette » un élément de la boîte à outils de l’ingénieur, du genre « petite vrille » !  Et en effet, les feuillets étant traversés de part en part, le trou ressemble à s’y méprendre à la perforation d’une mèche pour le perçage. Mais nous ne sommes pas ici dans le registre de l’inerte, … plutôt du côté du vivant. Il s’agit d’un petit coléoptère ravageur du bois qui colonise (malheureusement aussi) les bibliothèques et porte le nom de nicobium castaneum. Avec d’autres agents de dégradation (lépismes ou poissons d’argent, blattes, psoques, mites, dermestes, anthrènes, attagènes), ils se régalent de matières végétales (amidon contenu dans la colle ou le papier) ou animales (kératine des cuirs, peaux, parchemins). A leur manière, ils sont papivores (consommateurs plus que passionnés) et dévorent les livres.

Alors les vrillettes ont-elles des dents ? Je me doutais bien que cette question vous ‘taraudait’
depuis longtemps. Comme les mâchoires du mandrin enserrent un foret dont le mouvement de
rotation finira par découper des copeaux, les puissantes mandibules des larves xylophages, bien ancrées sur une tête durcie (sclérifiée) et rétractée sur un large thorax, forent et maçonnent des
galeries. Certaines digèrent la cellulose (grâce à une enzyme) et ne produisent pas de vermoulure, agissant ainsi en toute discrétion.

Mais ce n’est pas la vrillette qui a inspiré les scientifiques pour rendre les torpilles plus pénétrantes mais la crevette-mante dont le marteau peut percer les blindages de coquillages. On vous l’avait dit : le perçage est une technologie qui remonte à l’âge de pierre !

Source : Suppl. d'AM n°25 du 15 mai 2017